Le projet ManEGe (management energy game : jeu de gestion de l’énergie)
est né suite à un appel à projet serious
gaming lancé par le gouvernement français dans le cadre du volet numérique du plan de relance de
l’économie, avec l’intention aussi d’établir un partenariat entre un laboratoire de recherche et des
entreprises privées. Sarah Labelle, Olivier Mauco et Aude
Seurrat, chercheurs au CNRS - MSH Paris Nord se sont engagés dans ce projet en
considération des intérêts du serious game comme objet de recherche, enjeu de développement et pour la construction
d’une filière d’activités. Ce projet a permis selon les intervenantes dans cette
vidéo de croiser les pratiques du secteur du jeu vidéo et les expertises du
secteur du e-learning dans la conception du jeu ManEGe : architecture,
contenus, médiations, parcours d’apprentissage, évaluation, etc.
Recueil de données et analyse de l’existant
Les concepteurs pédagogiques du jeu ont procédé par étapes.
Recueil d'information sur le secteur et les futurs utilisateurs. Des enquêtes macro et
micro sur le secteur de l’énergie ont montré qu'il s'agit d'un secteur est en pleine
mutation en France à cause du passage d’un monopole à un secteur libéralisé
et qu’il n’y a donc pas de modèle stable dans ce domaine. Les chercheurs ont
aussi opéré une analyse du discours des
publics ciblés par la formation (jeunes cadres chargés de mission dans les
collectivités). Ils ont noté leur difficulté à appréhender l’ensemble des
évolutions du secteur, à comprendre les rapports entre production, transport,
distribution, et commercialisation de l’électricité, leur attente d’interactions
entre formés.
Analyse du matériel existant. Par ailleurs, l’analyse de la dizaine de jeux répertoriés
sur le thème en question a montré que le joueur y a toujours un point de vue omniscient, c’est
lui qui gère tout et bien, pense-t-il, pour peu qu’il utilise des énergies
propres préconisées pour le développement durable. Il ne pense nullement à la
façon dont ces énergies transforment le territoire et surtout quel est l’impact réel de ses choix sur les conditions
d’accès à l’énergie pour les
populations.
Le questionnement des
chercheurs et la problématique à traiter se précisaient : « Crée t-on un jeu de gestion dans lequel le joueur sera omniscient et fera en
sorte que l’électricité atteigne le consommateur qu’il soit industriel ou un
simple petit habitant ou est-ce qu’on fait un jeu de rôles ans lequel les
acteurs seront amenés à comprendre les relations des uns avec les autres, de
travailler sur la perception qu’un professionnel peut avoir de l’espace dans
lequel il intervient ? » Dans tous les cas, il fallait rechercher l’équilibre
entre vulgarisation et complexité, assurer l’immersion dans un environnement
qui permet la quête du savoir avec le développement de savoir-faire en
interaction avec tous les acteurs, chacun pris dans sa spécificité.
Des
cas au scénario pédagogique
L'approche pédagogique choisie fut celle de prendre des situations réelles et de les exemplifier. Ces cas doivent être typiques et peuvent
s’inspirer de projets aboutis ou en passe de l’être. L’exemplification se fait
sur deux étapes : d’abord le récit du cas est découpé en plusieurs étapes ou phases, ensuite il est
décontextualisé. La contextualisation nécessaire à la pratique du jeu et à l’apprentissage
se fait alors au sein de l’univers fictif dans lequel évoluent les personnages,
à savoir celui d’une apocalypse suite à laquelle tout le travail
d’électrification de l’environnement doit être repris. Le personnage
incarne un statut, il interagit avec d’autres acteurs et se trouve confronté à des
situations où il doit mobiliser des savoirs
pour progresser dans le jeu, c’est-à-dire réélectrifier progressivement le
milieu détruit. De cette façon, le joueur est mis en situation de reproduire
autour des cas exemplifiés des procédures et des actions puisées dans les situations réelles. Il participe à un jeu social sans grand risque si ce n’est celui
d’opérer des choix, de gagner ou se tromper, s’engager ou se désengager et dans
tous les cas expérimenter, améliorer sa stratégie et implicitement s’autoévaluer
par le résultat de ses interventions.
Cette étude de cas montre que pour être efficace, un jeu sérieux doit parvenir à intégrer des informations crédibles dans un scénario qui, lui, peut s'éloigner de la réalité. Le joueur doit tenir un rôle et ses actions dans le jeu doivent avoir des conséquences sur la situation dans laquelle il est plongé. C'est cette incidence sur la situation qui est porteuse d'apprentissages, dans la mesure où elle est la conséquence d'une appropriaiton des informations.
Les enjeux pédagogiques de l'élaboration d'un serious game sur l'énergie. Journées Numériques aux RUE.2011. Par Sarah Labelle, Olivier Mauco et Aude Seurrat, CNRS - MSH Paris Nord. Médiathèque de l'Université Paris Descartes.
Mots-clés:
Serious Game
Énergie
jeu sérieux
jeu de rôle
projet
Intention
Jeu de gestion
Voir plus d'articles de cet auteur