Depuis quelques années les piliers de l’orientation professionnelle ont été bouleversés.
40 ans en arrière, l’étudiant se choisissait souvent un métier pour la vie. Professeur des écoles, boucher, chimiste, commercial… et il s’y tenait une bonne partie de sa vie professionnelle. 20 ans plus tard, les gens ont commencé à considérer exercer plusieurs métiers dans leurs vies et aujourd’hui, c’est l’incertitude...
Quels seront les métiers de demain ? Personne ne le sait, ni les gens sur le terrain, ni les gouvernements et même ceux qui sont dans l’hyper-innovation laquelle va créer les métiers de demain. D'autant qu'en plus, ces derniers sont déconnectés des traditionnelles chambres de commerces qui étaient les têtes de pont du savoir aux sujet des besoins et de l’évolution des métiers.
Déjà en Suisse, depuis 15 ans, un jeune qui veut se lancer dans la formation professionnelle, parfois se teste sur plusieurs stages avant de savoir ce qu’il lui plaît, voire souvent il n'est pas certain de son choix. Pourquoi ? Parce que le contexte professionnel qualifié est déconnecté du monde de l’éducation.
En France, depuis quelques années, les élèves font des choix (3 maximum) et c’est l’administration qui les case dans telle ou telle formation. Résultats, ils font un an, deux ans, 3 ans et à un moment donné, ils changent d’orientation car cela ne leur convient pas.
Objectif de l’orientation professionnelle
L’objectif de l’administration, c’est de leur trouver un travail. Mais, est-ce suffisant ? Dans quels buts ?
Le but est d’obtenir des travailleurs actifs dans la société, qui soient pro-actifs et non à la charge de leur famille ou des autres citoyens. Mais, n’y-a-t-il pas d’autres critères à prendre en compte ? Voici une excellente vidéo tirée d’un programme de coaching qui pose les bases :
votre métier doit vous plaire et vous correspondre : ça semble bête, mais combien de personne exercent des métiers qui ne les motivent pas ou qu’ils n’aiment pas ? Résultat, cette motivation n’est pas au rendez-vous, la qualité de vie de ces personnes en est péjorée et au final les employeurs ne sont pas contents. Il y a un gros travail de fond à faire sur ce sujet.
votre métier idéal doit apporter de la valeur aux autres : c’est clair que ne pas avoir les pieds sur la terre quand on veut exercer un travail, cela fini souvent mal ou dans la misère ou à l’aide sociale. Apprendre à être réaliste, utile et efficace est peut-être une matière qui manque dans les matières éducatives.
votre capacité à exercer le métier de votre choix : là, ça devrait être aussi un sujet traité par l’école, mais, comme celle-ci reste très théorique dans ses programmes, il y a encore le chaînon manquant à construire : celui de l’évaluation non plus par domaines d’activités, mais par compétences. Il est difficile pour les systèmes éducatifs de faire le pas car il n’y a pas de grilles claires, normatives et efficaces pour réaliser ces évaluations des compétences utiles. Voici ce que l’on en disait en 2017 :
“Dans l'éducation des adultes, le sentiment de l'urgence d'identifier avec précision ces compétences semble encore plus puissant. L'éducation des adultes ne peut souvent pas se permettre d’être expérimentale. On attend une référence directe qui est nécessaire aux besoins actuels et prévisionnels, liés au poste ou aux nouveaux rôles dans lesquels la personne couverte par la formation doit se trouver.
Une analyse cohérente des besoins de formation à cet égard vise précisément - l'identification précise du déficit de compétences, qui peut être complété par le transfert de connaissances ou de compétences”.
Source : Les compétences du futur - de quoi s'agit-il ? Comment le secteur de l'éducation des adultes devrait-il soutenir leur développement ? par Kacper Nosarzewski -décembre 2017 https://epale.ec.europa.eu/bg/node/46668
Les réalités du terrain
Aujourd’hui, on n’oserait plus écrire cela. Pourtant le texte précédant ne date que de quelques années. Déjà que tout cela était empirique, mais en plus les cartes se sont depuis encore brouillées.
Quant à l’école, elle fonctionne toujours sur la capacité des personnes à assimiler des savoirs théoriques. Les gens avec des compétences orientées pratiques et appliquées sont souvent laissés de côté. Cette dichotomie entre le monde de l’école et celui du travail fini par générer des problèmes compliqués à réparer plus tard :
“Les dérives néo-libérales ont plongé le monde du travail, les familles, les institutions… et l’action sociale dans une instabilité et une insécurité permanentes qui ont brouillé les repères, précarisé tous les aspects de la vie et refermé toute perspective d’avenir meilleur. La conscience d’appartenir à une classe sociale capable de se mobiliser collectivement a cédé devant la vision d’une société d’individus ne pouvant plus compter que sur eux-mêmes.
Le pauvre exploité a laissé la place au précaire vulnérable. Ce qu’il faudrait, n’est plus remettre en cause le contexte sociétal, mais doter l’exclu de la volonté qui lui manque pour s’insérer. Il doit se prendre en main pour dépasser les fragilités dont il serait totalement responsable.
Les politiques sociales entretiennent cette précarisation, en choisissant d’adapter aux effets plutôt que de s’attaquer aux causes. Le travail social devient complice quand il exhorte l’individu à contrôler par lui-même les différentes dimensions de sa vie : participation sociale, développement personnel, résilience… Les travailleurs sociaux perdent leur âme, quand ils conseillent pour ne pas perdre pied, décrocher ou échouer, de développer ses compétences, se mobiliser, s’autonomiser. Que propose donc l’auteur, comme alternative ? Réparer la confiance en l’avenir, en les autres et en soi. Pour y parvenir, il faut sortir de l’illusion de réussir tout seul. Il est essentiel de répondre au besoin d’appartenance à quelque chose de plus grand que soi et de créer une communauté se structurant non pas d’emblée mais forgeant son identité dans la construction d’une action commune”.
Cette incapacité structurelle d’orienter les personnes selon leurs choix, leurs motivations et la valeur qu’ils peuvent amener dans la société, touche à la dignité de l’individu et à sa capacité de rebondir quelques soient les situations. C’est ce que l’on appelle la résilience, ce qui va transformer un individu amorphe, passif dans un contexte classique en un individu heureux et pro-actif. Celui que tout le monde voudrait engager.
De plus le monde du travail, même si l’avenir est incertain, est plutôt orienté pratique professionnelle avec le savoir être social, le savoir faire et le savoir désapprendre pour apprendre autre chose. Ces savoirs ne correspondent pas à des définitions de métier mais à des compétences personnelles et professionnelles que l’on peut mettre en valeur dans plusieurs contextes professionnels.
Aujourd’hui, le taux de réussite à l’embauche des services des Ressources Humaines est de 50%. 50% d’échecs et 50% de réussites. Alors, c’est beaucoup d’argent perdu par l’entreprise, mais aussi beaucoup d’échecs psychologiques pour les employés qui ne seront pas gardés dans l’entreprise. Il y a aussi quelque chose à changer pour que le recrutement redevienne un moment positif et non pas de stress, de peurs et d'hémorragie d’argent.
“Mais qu’il s’agisse de l’agroalimentaire, de l’automobile, de la métallurgie, etc., les dizaines de milliers de postes à pourvoir ne suffisent pas à attirer les candidats qui se font de plus en plus rares. Un recruteur sur deux va rencontrer des difficultés à s’entourer de nouveaux collaborateurs cette année (50 % contre 41 % en 2017). Pénurie de profils, compétences qui ne correspondent pas, manque d’attractivité de la filière… Les raisons varient et les postes les plus difficiles à pourvoir touchent principalement l’agroalimentaire : ouvriers non qualifiés des industries agro-alimentaires, boulangers, pâtissiers, vendeurs en produits alimentaires…”
Si on va voir du côté des chercheurs d’emploi, on trouve des choses intéressante dont l’école peut s’inspirer : un CV aujourd’hui, cela met les gens dans des cases et catégorise les personnes. Il faut sortir de cette approche classique et voir ce qui est transférable.
Pôle emploi, organisme de recherche d’emploi national en France propose des pistes sur l’approche par compétences qui sont transférables à l’école :
Rien n’est réellement modalisé aujourd’hui. Tant qu’il n’y a pas de normalisation des compétences, les professionnels du recrutement et ceux de l’éducation seront dans l’empirisme. Mais, c’est mieux que de ne rien faire.
Je reprend ce texte de mon excellent confrère Denis Cristol dans un article sur une fiche de lecture qui n’a pas pris une ride en 10 ans et qui vient compléter les pistes de travail proposées dans cet article:
“Finalement la conclusion nous donne à voir un nouveau mode de pensée du management qui donne plus de place aux hommes d’actions plutôt qu’aux planificateurs, qui s’appuie plus sur des enquêtes qualitatives que quantitatives, qui favorise l’exploration plutôt que l’exploitation, qui génère du mouvement plutôt qu’il ne préserve des états, qui encourage la responsabilité au détriment de la dépendance, qui accepte des vérités complexes plutôt que des vérités universelles, en résumé qui promeut l’accompagnement plutôt que la directivité”.
La vision du conseiller d’orientation est plutôt désuète. Ce ne sont plus des gens attendant derrière leur bureau afin de conseiller des jeunes pour leurs études. Aujourd’hui, le rôle est devenu très proactif, particulièrement aux États-Unis, où ils s’assurent de la réussite du plus grand nombre. Or, ce rôle fortement apprécié des élèves disparaît au fur et à mesure que les budgets de l’éducation publique fondent.
L’évaluation psychologique, à défaut d’être une science exacte, a le mérite de s’appuyer sur d’impressionnantes compilations de résultats d’où elle peut tirer des portraits statistiques de grande précision et des profils types cohérents qui ressemblent presque à des profils d’ADN...
… et, avec lui, le temps de l’angoisse des familles et des élèves. En France, le système scolaire prévoit deux grands paliers d’orientation : après la troisième et après la terminale. Que se joue t-il à ce moment-là ? Quels paramètres interfèrent avec les choix qu’effectuera l’adolescent – ou ceux qui seront effectués pour lui ? Éléments de réponse qui invitent tout à la fois à prendre la mesure des difficultés affrontées par les jeunes et à relativiser la portée des choix effectués.
À peu près tous les organismes et entreprises ont compris que du recrutement de compétences dépendait une bonne partie de leur avenir. Pour avoir des gens compétents, il faut les former et pour les former… la première étape consiste à les intéresser au métier.
Nous avons presque tous passé un test d’orientation ou de personnalité afin de savoir pour quel domaine d’études ou de carrière nous irait bien. Or, ces tests qui foisonnent aujourd’hui sur Internet ne sont-ils pas trop catégorisant? Ont-ils réellement une valeur pour les conseillers d’orientation ou sont-ils dépassés étant donné les nouvelles approches en matière de ressources humaines?
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