« La nature, qui ne nous a donné qu'un seul organe pour la parole, nous en a donné deux pour l'ouïe, afin de nous apprendre qu'il faut plus écouter que parler. »
Ce proverbe turc empreint de sagesse nous rappelle que nos compétences auditives et langagières nous viennent de la nature et que l’art de la conversation n’a de sens que si on sait écouter avant de parler. Ceci dit, saviez-vous que la nature, elle aussi, a ses propres moyens de communication ? Et si je vous disais que les champignons avaient développé une façon de se parler entre eux ou que les arbres avaient développé une conscience de soi et une sensibilité ? Pure folie, intense divagation ? On parle des Schtroumpfs, là ou quoi ? Que nenni, bon ami lecteur avide de découvertes, ces faits sont purement scientifiques !
Vous doutez encore ? Alors, enfilez de bonnes chaussures de marche, mettez-vous au chaud et surtout… chut ! Silence, plus un mot, on va faire une balade en forêt, alors prêtez l’oreille à ces végétaux qui nous entourent et écoutez-les attentivement, ils ont peut-être quelque chose à dire !
Science sans conscience n’est que ruine de l’âme
… disait Rabelais (1483-1553), écrivain français humaniste de la Renaissance. Mais les végétaux, les plantes, les arbres ont-ils une âme ? Il semblerait que oui ! Ce sont même des études très sérieuses menées par des biologistes du laboratoire Physique et physiologie intégratives de l’arbre en environnement fluctuant (Piaf) à l’université de Clermont Auvergne qui le disent !
Selon ces chercheurs, les arbres seraient munis d’une conscience de soi, d’une sensibilité et d’une forme d’intelligence. Bon, d’accord, ils ne parlent pas. Et si vous pensez aux fameux Ents chers à Tolkien, ces majestueux arbres des forêts de la terre du Milieu, guidés par leur doyen Sylvebarbe, qui parlaient entre eux, nous sommes encore loin de cette fiction !
Cependant la sylvothérapie, pratique ancestrale servant à rééquilibrer l’organisme au niveau mental, émotionnel et physique a particulièrement la côte depuis quelques années. L’homme chercherait à se rapprocher de la nature, mais de là à pouvoir communiquer avec elle, c’est une autre paire de manches.
Appuie sur le champignon !
Si nous n’avons pas encore trouvé le moyen de discuter avec la nature, il semblerait que certains végétaux aient pu développer un certain système de « langage ». Quoiqu’apparemment farfelue, cette affirmation a été étayée par le scientifique britannique Andrew Adamtzky qui a, au fil de ses différentes investigations auprès de quatre espèces de champignons (l’enoki, la branchie fendue, le fantôme et la chenille), pu prouver qu’une communication se faisait entre eux par le biais d’une activité électrique.
Électrique ? Oui, oui, électrique, car aussi étonnant que cela puisse l’être, ces organismes formés d’un pied surmonté d’un chapeau, poussant généralement dans les lieux humides, possèdent également la spécificité de posséder dans leurs racines des microélectrodes !
Peut-on néanmoins parler de « langue » ? Ce serait un peu présomptueux. Toutefois, en se basant sur la quantité d’échanges entre ces végétaux, le chercheur a essayé de mener une analyse linguistique qui lui a finalement permis de mettre en évidence des moments de pics et de creux : « Nous avons constaté que le nombre et la longueur des pics suivent la distribution et la longueur des mots dans les échanges des humains ». Selon le chercheur, cette communication entre champignons s’apparenterait avec des éléments linguistiques propres aux langues anglaise et russe. Cinquante modèles de pics ayant été observés, il estime qu’il en est de même pour le nombre de « mots » échangés par les champignons.
Mais qu’en disent les autres scientifiques, notamment ceux spécialisés en mycologie (étude des champignons) ou en biologie fongique (qui a rapport aux champignons) ? En hommes (et femmes !) de science prudents, ils émettent des limites à ces trouvailles et à l’avancement de ces travaux : « L’interprétation en tant que langage, c’est être un peu trop enthousiaste » et « Cette étude montre des modèles rythmiques dans les signaux électriques qui sont d’une fréquence similaire à celle des impulsions nutritives » (Dan Bebber, membre du comité de recherche en biologie fongique à la British Mycological Society). En effet, en dépit de ces travaux -pourtant sérieux et documentés- difficile d’affirmer que les champignons discutent gaiement entre eux !
Si, lors de vos promenades en forêt, vous entendez des murmures provenant des champignons, peut-être êtes-vous en train d’assister à une conversation mycologique, à moins bien sûr que ce ne fût certains petits êtres bleus à chapeaux blancs qui les habitent que vous n’entendiez !
Quoi qu’il en soit, il est possible que comme pour les animaux qui communiquent entre eux pour s’avertir d’un danger ou pour échanger de la nourriture, les végétaux aient établi entre eux un langage qui leur est propre. Et à moins que Google Traduction ne soit en train de développer la langue « champignon » sur l’I.A. de son traducteur, admettons que l’homme ne l’a juste pas encore comprise…
Sources et illustrations
- Les champignons communiquent entre eux avec des « mots », Nathalie Mayer, Futura-Sciences, 16/04/2022, https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/champignon-champignons-communiquent-eux-mots-97860/
- Language of fungi derived from their electrical spiking activity, Andrew Adamatzky, Royal Society Open Science, 04/2022, https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rsos.211926
- Les arbres ont une « conscience de soi » et une sensibilité, Gaspard d’Allens et Alain Pitton, Reporterre, 21/05/2021, https://reporterre.net/Les-arbres-ont-une-conscience-de-soi-et-une-sensibilite
- PIxabay, https://pixabay.com/images/id-4652501/ et https://pixabay.com/images/id-3385957/
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