Qu’ont en commun les chargés de cours et autres professeurs adjoints dans les centaines universités américaines ?
Plusieurs choses, mais surtout une prise de conscience de l'inéquité de leurs conditions. Comme pour les gens de la rue dans plusieurs pays du monde, comme pour les employés dispersés qui travaillent pour des entreprises multinationales, Internet permet une connexion rapide et intense entre des gens séparés géographiquement mais unis par une même préoccupation.
The Adjunct Project est une puissante illustration du phénomène : une base de données spontanée des conditions de travail et salaires des chargés de cours et professeurs adjoints s’est créée en quelques semaines et s’étend même maintenant en dehors des États-Unis : Canada, France, Angleterre, Espagne, y ont des entrées. Rien n’empêche d’y ajouter celles d’institutions du Maroc, du Cameroun ou de la Tunisie...
À cette base de données s’ajoutent un blogue, un forum de discussions et un répertoire de liens et d’actions en cours.
Des revendications de base
Le simple fait d’avoir des points de comparaison entre institutions incite déjà celles-ci à considérer le problème. Les institutions qui offrent les meilleures conditions attirent forcément plus de candidats-professeurs intéressants. A partir de là on devrait voir se mettre en place une uniformisation des conditions de base. Les revendications portent sur les points suivants :
- de meilleures conditions salariales,
- des possibilités d’avancement,
- une certaine prévisibilité de travail d’une saison à l’autre;
ce genre de conditions. Comparées à celles des professeurs en titre, celles des adjoints sont le plus souvent pitoyables.
Les buts du projet sont :
- promouvoir une plus grande transparence dans les pratiques d’embauche des universités
- fournir une référence rapide pour les professeurs, étudiants et parents en ce qui concerne la valeur d’une institution donnée en rapport avec l’éducation et les droits humains
- valoriser les institutions qui traitent bien les employés de leurs facultés et, à l'inverse
- dénoncer les institutions qui ne traitent pas bien leurs membres
- relier les professeurs adjoints entre eux ainsi que quiconque est intéressé à la préservation de l’enseignement supérieur.
Verra t-on un mouvement dépasser les limites d’une université et en inclure plusieurs simultanément ? Si l'on garde en mémoire que les chargés de cours et autres adjoints assurent plus de 60 % de la charge d’enseignement et représentent plus de 66 % de ceux qui enseignent à l’université, un mouvement national pourrait bien changer radicalement le rapport de forces.
On suppose que le mouvement syndical prend acte de ce qui se passe : on est prêt à s’organiser pour s’occuper de ses affaires et participer à l’établissement de conditions minimales et équitables pour tous.
En formation à distance
Les conditions des tuteurs en formation à distance sont au moins aussi hétérogènes que celles des chargés de cours, avec de surcroît une dispersion évidente mais avec l'avantage d'une habitude des outils internets. Déjà il existe au moins un forum francophone de tuteurs ([email protected]),
Le défi d'établir des conditions minimales est décuplé par la variété des fonctions et des contextes dans lesquels pratiquent les tuteurs. Un bon début serait de savoir ce qu'il en est dans chaque institution...
Références :
The Adjunct Project
La « nouvelle majorité » d’enseignants contractuels tente de se faire entendre
Photo: Walking in the shadows - Piro - CC
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