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Publié le 10 juillet 2012 Mis à jour le 10 juillet 2012

Eviter la frustration dans les groupes de travail en FOAD

Le travail collaboratif à distance peut générer autant de frustration que de satisfaction. Comment éviter cet écueil ?

Le travail collaboratif est une voie très intéressante dans le cadre d'une formation à distance. Non seulement il atténue le sentiment d'isolement que peut générer cette modalité de distribution de la formation, mais il permet également aux apprenants d'acquérir des habitudes de travail en commun qui leur seront utiles en bien d'autres occasions. Ren de tel en effet que de travailler ensemble pour affronter le conflit cognitif (ie : réaliser que tout le monde ne pense pas comme soi et modifier ses propres représentations sous l'influence de celles des autres), apprendre à composer avec des méthodes et rythmes de travail différents des siens, prendre conscience de l'intérêt et des limites du travail de groupe. 

En formation à distance, le travail de groupe permet aussi d'utiliser des outils ad hoc, tels que les tableaux blancs partagés lors de réunions synchrones, les outils de taitement de texte en ligne, les applications de gestion de projet, et bien d'autres.

Mais ce travail collaboratif à distance ne se met pas en place de lui-même. S'il n'est pas soigneusement préparé, organisé et modéré, il risque de générer plus de frustrations que de satisfactions. Les remarques des apprenants sont connues : "c'est moi qui fais tout", "on dirait que les autres se fichent de cette formation", "ils croient sans doute que je peux rester sur Skype jusqu'à 3 heures du matin à les attendre !", "nous n'avons pas les mêmes objectifs; pour moi, cette formaiton est vraiment importante", "j'ai envoyé 77 messages à mes co-équipiers et j'ai obtenu 2 réponses, ils me détestent et veulent me mettre à l'écart", "on ne se comprend pas", j'en passe et des meilleures.

Eh bien voyez-vous, ces remarques ne sont pas spécifiques à LA formation à distance que vous suiviez ou à LA formation à distance que vous animez. Elles sont banales et apparaissent dans l'immense majorité des formations à distance qui privilégient le travail collaboratif. C'est ce que nous apprennent Margarida Romero et Neus Capdeferro dans un article intitulé "Are Online Learners Frustrated With Colaborative Learning Experiences ?" publié dans the International Review of Research in Open and Distance Learning en avril 2012.

Après avoir précisé le sens du terme "frustration", les auteures signalent qu'il s'agit là d'un des sentiments négatifs les plus couramment associés à la formation en ligne. Cette frustration peut naître de l'environnement d'apprentissage, du contenu du cours, et surtout de la difficulté à travaller avec des personnes que l'on ne connaît pas assez. Parfois, cette frustration conduit à l'abandon de la formation. 

Les auteurs ont cherché à identifier précisément les sources de la frustrations chez les apprenants à distance, afn d'émettre des recommandations visant à la limiter. Pour cela, elles ont réalisé une enquête auprès d'une quarantaine d'étudiants engagés dans un Master à l'université ouverte de Catalogne, ou elles enseignent toutes les deux. Le cursus d'étude a été sélectionné car il implique de nombreuses tâches collaboratives, tant dans la construction des connaissances que dans les rendus. 

 

Les résultats

Les étudants interrogés disent dans leur majorité avoir resenti un niveau "modéré" de frustration. 40 % d'entre eux disent avoir ressenti cette frustration "occasionnellement", mais 25 % estiment avoir "souvent" ou "très souvent" ressenti de la frustration.  Le phénomène est donc bien réel, même si dans ce cas précis, il n'a pas ou a peu affecté l'opinion des étudiants sur la qualité de la formation et son adéquation avec leurs attentes. 

La source majeure de frustration (57,5 % de mention) tient à la perception d'un déséquilibre perçu dans l'engagement, la responsabilité et l'effort des étudiants avec lesquels on travaille.  Viennent ensuite l'absence de partage des objectifs de formation (22,5 %), les difficultés de communication, les difficultés liées aux négociations (17,5 %), les différences de qualité entre les contributions individuelles (15 %)... On constate que les problèmes liés aux relations entre étudiants et à leurs perceptions des uns sur les autres représentent 7 facteurs sur les 10 qui étaient listés, et tous les facteurs qui ont un poid majeur. 

 

Les recommandations

Pour atténuer ce sentiment de frustration et rendre les travaux collaboratifs encore plus efficaces (bien que la perception des difficultés propres à ce mode de travail constitue en soi un acquis de formation), les auteures émettent différentes recommandations :

- Les institutions douvent fournir une information détaillée sur ce que va apporter la formation et ce qu'elle n'apportera pas, sur les implications de l'engagement dans une formation en ligne et surtout sur les compétences à développer pour profiter pleinement du travail collaboratif à distance.

-Elles ont intérêt à préparer les apprenants au travail collaboratif en vérifiant leurs habiletés et en leur faisant réaliser des travaux préparatoires qui leur feront prendre conscience de ce qui les attend. La réalisation d'une pré-tâche collaborative, en tout début de formation, peut ici jouer un rôle crucial et encourager les apprenants à abandonner leurs représentations individualistes et subjectives de l'apprentissage, au bénéfice d'une claire vision de l'avantage de l'interdépendance des apprenants et de l'accepation d'une intersubjectivité. 

- Les institutions doivent mettre en place des environnements d'apprentissage qui facilitent les différentes modalités de communication entre apprenants. 

- Les enseignants, modérateurs, tuteurs... ne doivent pas craindre d'aborder les problèmes causant de la frustration avec les apprenants. Reconnaître les sources, construire des attitudes plus positives à l'aide d'un tiers, s'avère payant pour la poursuite du parcours. 

 

Un exemple de démarche limitant la frustration des apprenants

A un niveau plus spécifique que celui qui est adopté dans cet article, de récentes expériences nous montrent que le choix des outils de travail s'avère crucial pour minorer le sentiment de frustration qui peut empoisonner un travail de groupe à distance. Mais bien entendu, l'utilisation des outils doit répondre à une méthodologie précise.

Par exemple, les membres d'un groupe de travail à distance considèrent comme une évidence l'organisation de réunions synchrones via Skype ou tout autre dispositif de téléconférence, pour entretenir la convivialité, élaborer une représentation commune de la tâche à réaliser, et se coordonner. Mais la désillusion vient vite : ils réalisent que le temps pendant lequel ils sont tous disponibles pour la réunion est finalement fort restreint. Quand s'y ajoutent des problèmes de qualité de connexion et de décalage horaire, il peut même disparaître complètement. Devant cette difficulté, la plupart des groupes choisissent une stratégie alternative : les tâches sont réparties par écrit (et souvent par un leader "naturel" qui échappe ainsi au conflit cognitif) entre les membres et il est demandé à chacun de faire des observations sur les travaux des autres. Mais si les apprenants ne peuvent pas voir ce que les autres sont en train de faire, ils ne peuvent réagir que sur des travaux finis, ce qui est très difficile : on ne sait pas "par quel bout" commencer ses remarques, on craint de démolir complètement un travail qui a demandé beaucoup d'effort, etc.

Il est donc tout à fait intéressant d'utiliser des outils de production en ligne : outils de traitement de texte, de réalisation de cartes mentales et autres schémas, etc. Et surtout, de partager les travaux en cours, dès le début. Chacun peut ainsi réagir en temps réel (via les fonctions de commentaires associées à ces outils) sur de petits fragments, harmoniser sa propre tâche avec celles de ceux qui interviennent avant et après. 

Cette culture du partage du work in progress n'est absolument pas naturelle, surtout chez des apprenants qui ont été élevés dans la culture du "chacun pour soi" que l'on rencontre encore si fréquemment à l'école. Ce n'est pas la bonne volonté qui leur fait défaut, c'est l'habitude. 

Il ne s'agit là que d'un exemple d'initiative liée aux outils, pouvant faciliter une meilleure communication et détruire les idées que chacun se fait sur ses coéquipier, dans un groupe de travail collaboratif. Ces bonnes pratiques méritent d'être collectées et rassemblées dans un guide dont les acteurs de la formation en ligne tireraient le plus grand profit. 

 

Are Online Learners Frustrated With Colaborative Learning Experiences ? Neus Capdeferro, Margarida Romero, The International Review of Research in Open and Distance Learning, avril 2012. En anglais, téléchargeable au format pdf. 


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