
Le partage des cours, késako ?
Découverte de cette notion avec Bruno Devauchelle qui encourage les enseignants à ne pas être seulement producteurs ou consommateurs de cours, mais aussi des "partageurs". Tout le monde y gagne !
Publié le 18 mai 2014 Mis à jour le 18 mai 2014
La traduction est un outil essentiel pour qu'une œuvre puisse dépasser ses propres frontières linguistiques et touche des publics variés. C'est grâce à la traduction que certains films et romans connaissent un succès universel. Le doublage et le sous-titrages ont ainsi grandement facilité la diffusion des séries télévisées. Mais avant qu'une série soit doublée, il faut qu'un diffuseur achète les droits, la place dans sa grille, commande le doublage, etc. Bref, le chemin est long, trop long pour nombre d'entre nous, surtout que nous sommes habitués à trouver notre bonheur en ligne...
La production de séries télévisées connaît depuis le début des années 2000 une sorte d'âge d'or, en particulier (mais pas exclusivement) aux Etats-Unis. Des oeuvres de grande qualité voient le jour, dans des genres fort différents : fantasy, réaliste, humoristique, policier... Il y en a pour tous les goûts... À condition de comprendre les intrigues ! Heureusement, des fans traducteurs se groupent pour sous-titrer les oeuvres en français bien avant leur diffusions télévisée, pour le plus grand bonheur des internautes de France, de Belgique et du Québec. Un acte illégal, mais qui permet le partage de produits culturels et la création de communautés de fans.
Les traducteurs bénévoles, appelés les fansubbers, ont commencé en traduisant des séries d'animation japonaises (animes) comme Naruto, Dragon Ball, Bleach, etc. Le but était de fournir aux Occidentaux les saisons de ces dessins animés dont plusieurs ne franchissaient pas l'étape du doublage et de la diffusion hors du Japon. Conséquemment, le travail de fansubbing a permis aux francophones de connaître les séries animées en vogue au Japon.
Dans les années qui suivirent, la télévision américaine a commencé à créer de véritables phénomènes culturels avec des séries comme Lost, Desperate Housewives ou 24 (24 heures chrono). Des fansubbers ont alors commencé à sous-titrer les épisodes au lendemain de la diffusion originale américaine. Bien que ces séries soient diffusées en France, les fans pouvaient, de cette façon, suivre l'intrigue sans devoir attendre 6 mois ou un an avant d'avoir droit à la version française officielle.
Vous remarquerez qu'on parle de fansubbers généralement au pluriel. En effet, ce travail ne se fait jamais seul. Il y a tout d'abord celui qui déniche l'épisode (souvent téléchargé illégalement) et qui téléverse le produit sous-titré sur un site de torrent ou de diffusion en flux. Évidemment, c'est celui qui risque le plus de se retrouver avec des réclamations et des menaces de représailles de la part des distributeurs et producteurs de l'oeuvre. Une équipe de traducteurs amateurs réalise une première traduction en écoutant les dialogues. Par la suite, des relecteurs vérifieront la qualité du sous-titrage et corrigeront les éventuelles erreurs. Pour les animes, s'ajoute un autre poste qui est celui de créer une bande karaoké des chansons pour les génériques de début et de fin qui comprend à la fois les caractères japonais, le furigana et la langue de traduction. Enfin, l'encodeur coupe le dialogue en segments pour respecter le rythme de l'épisode tout en s'assurant que les auditeurs puissent suivre ce qui est écrit.
Évidemment, cela énerve quelque peu les studios américains qui voient d'un mauvais œil cette pratique qui encourage, en quelque sorte, la consommation illégale des séries. Toutefois, l'activité est très peu sanctionnée jusqu'à maintenant. Les fansubbers ne désirent pas, en général, promouvoir le piratage. D'ailleurs, ils ont arrêté de sous-titrer la série Lost quand la chaîne française TF1 s'est mise à proposer aux spectateurs français de regarder en vidéo sur demande l'épisode qui venait juste d'être diffusé aux États-Unis, le tout pour un prix minime. Les fansubbers considèrent plutôt leur travail comme de la médiation culturelle; ce sont des passionnés qui partagent leur goût pour une série et qui répondent aux demandes des consommateurs. D'ailleurs, on pourrait se dire que leur « lobbying » a fonctionné puisque les diffuseurs francophones ont dû s'ajuster à leur présence sur Internet.
Les véritables traducteurs n'apprécient pas non plus ce travail effectué par des amateurs bénévoles, dont ils mettent en doute la qualité. En effet, ils remarquent que souvent, les fansubbers ne comprennent pas toutes les nuances d'un dialogue. Particulièrement dans le domaine de l'humour où les traductions littérales de calembours ou de blagues désamorcent l'effet comique.
Toutefois, on aurait tort de sous-estimer la tâche immense de ces bénévoles qui en font parfois plus que les sous-titrages traditionnels. À dire vrai, il arrive régulièrement que sous-titres ainsi réalisés contiennent des informations supplémentaires sur le thème de la série. Cela se produit souvent avec les animes, dont les sous-titres contiennent souvent des explications sur la société japonaise. Autre exemple : pour la défunte série Friday Night Lights, les fansubbers ajoutaient des annotations sur le football américain pour le public européen qui connaît peu ce sport.
Contrairement aux studios américains, les studios d'animation japonais n'ont aucun problème avec le phénomène du fansubbing. La « japanimation » en a même fortement bénéficié, sortant de l'archipel nippon pour obtenir une grande popularité aux États-Unis, au Canada, en France, etc. Ce qui a obligé des entreprises occidentales de distribution DVD à proposer ces séries et, qui plus est, avec un doublage local ou un sous-titrage professionnel. Là encore, les fansubbers gagnent à chaque fois, car c'est toujours leur but : promouvoir des créations japonaises de qualité en attendant une version légale et doublée en magasin ou à la télévision.
Certes, le fansubbing est un acte en soi illicite puisqu'il faut généralement consommer illégalement une série pour en profiter. Mais cela est aussi un moyen de faire connaître de nouvelles séries, sans que l'on sache toutefois si les consommateurs "pirates" se transformeront un jour en consommateurs payants. Difficile donc d'évaluer l'impact économique du fansubbing, mais cette pratique a incontestablement contribué à la célébrité de nombreuses séries.
Illustration : froussecarton via photopin cc
Références :
Bouazzoni, Nora. "Les "fansubbers", ces Robins des Bois du sous-titre." francetv info. Dernière mise à jour : 17 juin 2012. http://www.francetvinfo.fr/economie/medias/les-fansubbers-ces-robins-des-bois-du-sous-titre_101853.html.
Bourdaa, Mélanie. "Le fansubbing, une pratique de médiation culturelle." InaGlobal. Dernière mise à jour : 14 octobre 2013. http://www.inaglobal.fr/numerique/article/le-fansubbing-une-pratique-de-mediation-culturelle.
Traducteurs.com. "Traduction: le phénomêne du fansubbing, traduction vidéos." Dernière mise à jour : 15 juin 2010. http://blog.traducteurs.com/le-marche-de-la-traduction/le-fansubbing-une-passion-aux-frontieres-de-la-legalite-119.
Wurm, Alicia. "Anime and the internet: the impact of fansubbing." Reflexive Horizons. Dernière mise à jour : 18 février 2014. http://www.reflexivehorizons.com/2014/02/18/anime-and-the-internet-the-impact-of-fansubbing/.
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