Un seuil est franchi : on passe d’enfant à adulte, de pénurie à abondance, d’ignorance à savoir; la matière change de liquide à gaz, de cru à cuit, etc.. Entre les deux, c’est la transition. Elle évoque un état d’instabilité temporaire entre deux états identifiés. On lui donne différents noms : adolescence, développement, apprentissage, ébullition, cuisson, etc. Elles sont souvent inéluctables : programmées biologiquement, statistiquement probables, mécaniquement prévisibles. Quand les réserves s’épuisent où que la limite est dépassée, quelque chose doit changer. Les transitions mal assumées s’appellent crise, confusion, marasme, gangrène; bien contrôlées on parlera de changement, de transformation, de métamorphose, de renaissance...
D'un état humain à un autre, l’état d’esprit aussi se transforme; le niveau de responsabilité change. D’étudiant à travailleur, de salarié à entrepreneur ou retraité, d'exécutant à responsable, d’amants à parents, d’accompagnateur à meneur, de choriste à soliste, de peureux à aventurier, de néophyte à expert, de victime à résistant... dans tous les cas la transformation mobilise intensément. La transition se fait d'autant mieux qu’il y a préparation et murissement, même si parfois il faut murir vite. On comprend de mieux en mieux l’importance de l’accompagnement dans ces moments clés.
L'état final n'est pas nécessairement pire ou meilleur qu'avant, il est surtout différent. Le bonheur est une considération relative au progrès perçu; les mêmes conditions procurent un niveau de satisfaction distinct pour chacun.
Socialement, nous entrons en transition. Il faudra changer nos modes de vie. Il s’agit de passer d'une mentalité de pénurie et d'accumulation à une mentalité d'abondance et de partage, d'un climat de crainte à une ambiance de confiance et d'assurance, d'une école de règles et d’obligations à une où la responsabilité est partagée, où la souplesse remplace la rigidité, qu’elle soit administrative ou idéologique. Nous avons la possibilité de remplacer une perte présumée par des gains de plaisir, de fierté, de relations… en somme, par plus de vie.
Denys Lamontagne - [email protected]
Illustration : Debi Brady- Pixabay