
Innovation : impact, protection, entraves, recherche - Une étude européenne et une étude canadienne
L’innovation en ligne de mire
Publié le 23 février 2022 Mis à jour le 23 février 2022
L'exode rural est un phénomène d'abandon des campagnes et des modes de vie associés. Il a contribué au développement de "la modernité" et de l'industrialisation en transformant des agriculteurs en ouvriers spécialisés. Ce faisant il a été accompagné d'un remodelage systématique des propriétés foncières (remembrement) et des paysages, augmentant d'un même mouvement le rendement agricole, l'uniformisation des cultures et l'intensification de la pression sur les ressources naturelles.
Les historiens, les économistes et les experts jugeront des bénéfices quantitatifs qualitatifs et des renoncements de cette orientation, des effets de bords sur les langues, les cultures, les arts de vivre ensemble, la dynamique des territoires.
Selon l'organisme d'études Ipsos, en France, deux millions de citadins actifs ont déjà franchi le pas et se sont installés dans une commune rurale. Les motifs en sont la recherche d’une qualité de vie, la volonté d’un nouveau départ ou la volonté de renouer avec des racines familiales.
Dans un pays comme la France ce sont également 100 000 anglais et hollandais qui ont été attirés par les paysages les plus naturels. À ceux-là il faudrait ajouter 3 millions qui se sont éloignés des grandes villes pour vivre en leur périphérie. Ainsi ce qui est nommé par certains exode urbain est souvent une délocalisation vers le péri-urbain. Ce phénomène de désaffection des cœurs de ville toucherait l'Europe et le monde occidental dans son ensemble dans un moment croissant d'urbanisation mais paradoxalement engageant toujours plus vers une civilisation de la voiture, voire de la mobilité compte tenu des distances à parcourir dans le monde rural.
Rien de nouveau que ce balancier entre ville et villages ou petites villes. Avec la vague hippie des années 70, des jeunes ont fui les villes pour s'installer à la campagne et adopter des modes de consommations plus sobres. Ce retour à la terre pour certains devait permettre de faire d'autres expérience, d'éprouver la vie communautaire, de sortir de ce que certains appelleront la routine du "métro boulot dodo" et plus tard, de façon moins rimée, des "boulots de merde", autrement dit des emplois qui font tourner la machine économique mais qui ne portent d'autre sens que de s'épuiser à consommer entre embouteillages, écrans géants et spectacles racoleurs.
Aujourd'hui par un retour de tendance exacerbé par le covid, les chiffres montrent un abandon progressif de l'idéal métropolitain et des plaisirs de la grande ville et une popularité grandissante des villes moyennes voire des zones rurales, ou hyper rurale. Les néo ruraux s'installent dans des friches rurales, car soit ils sont trop pauvres pour vivre en ville, soit ils ont les moyens de vivre en ville et à la campagne et de penduler. C'est un semi exode qui se met en place ne dépeuplant pas entièrement les grandes métropoles mais faisant augmenter les prix immobiliers dans les villes de taille intermédiaires . Ces néo ruraux seraient bien admis par les ruraux déjà présents car ils participent de la vie des villages et leur présence justifie des services.
Ce qui change des années 70, c'est une offre de transport à grande vitesse et une possibilité de téléphonie mobile augmentée avec une plus grande acceptation du télétravail. Autrement dit des moyens matériels et une acceptation sociale élargie pour satisfaire des aspirations à la mobiquité.
La rencontre de ces néo ruraux aux habitudes urbaines et des autochtones héritiers de cultures locales pourrait bien produire de nouvelles dynamiques sociales, économiques et culturelles sur des territoires désertés par l'État. Et si la fertilisation des savoirs produisait un néo bon sens paysan, mélange de qualité du vivre sur un territoire et effort de symbolisation et de conceptualisation développé dans des zones de peuplement densifiée?
Il est attribué aux paysans un grand bon sens. Probablement celui-ci est dû à une capacité de faire avec la nature plutôt que contre elle, de l'observer, de procéder par pas prudents, d'avancer par essai-erreur en mobilisant toute sa tête car dans un cerveau en marche, ce sont des idées qui cheminent, et enfin de ne pas se presser.
Ce qui caractérise l’apprentissage dans une nature de faible densité démographique, ce sont des apprentissages sociaux basés sur l’observation, l’essai-erreur, l’entraide, la forte prise en compte du terroir qui détermine les paysages d’apprentissage, et enfin l’existence de traditions repères éprouvées par le temps. Cet ensemble de spécificités réunies contribue au bon sens paysan. Mais qu’est-ce que le sens et a fortiori le bon sens paysan ?
La « science du sens » a été particulièrement étudiée. Le sens combine les interactions et la perspective de 1'observateur. Selon Larsson (1997) : « le sens, pour être, doit contenir une cognition ou une conceptualisation subjectivement reconnue, codifiée et mémorisée par au moins deux locuteurs ».
Le sens est donc constitué d’échanges sociaux. C’est alors tout l’intérêt de voir s’hybrider culture rurale et culture urbaine, portée par les néo ruraux pour voir apparaître de nouveaux sens. Les pratiques, les valeurs, les façons d’envisager le monde se frottent et font émerger des questions et des solutions nouvelles. Les ressources des uns et des autres ont l’opportunité de se combiner et pourquoi pas de faire apparaître un néo bon sens.
Celui-ci serait une combinaison de points d’attention et de ressources décalées, des vues complémentaires qui construisent une perspective nouvelle, les évidences de l’un constituant les angles morts de l’autre. Par exemple l’un fait confiance au temps long, prend en compte les énergies de la nature, ses surplus et ses caprices, appréhende les distances et par conséquent a appris à anticiper; l’autre cherche la fluidité, la satisfaction rapide d’un besoin, l’appui d’une technique ou d’un concept ou d’un spécialiste pour résoudre les problèmes. Chacun dispose de ses outils de penser, de ses habitudes et de ses heuristiques [procédures de recherche et de découverte].
Les tiers lieux qui s’inventent actuellement pourraient bien être au confluent de ses façons de penser, inventant du même chef des circuits courts de distribution, des modes de mise en relation via internet, la prise en compte de projets, de ressources et d’idées dépassant l’immédiate proximité.
Sources
Educavox. Qu’est ce qui fait de la ruralité un territoire apprenant, inspirant et entreprenant
https://educavox.fr/accueil/interviews/qu-est-ce-qui-fait-de-la-ruralite-un-territoire-apprenant-inspirant-et-entreprenant
Wikipedia néo ruraux - https://fr.m.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9oruraux
Ipsos - Neo ruraux portraits de citadins venus s'installer à la campagne https://www.ipsos.comrura/fr-fr/neo-ruraux-portrait-des-citadins-venus-sinstaller-la-campagne
France inter https://www.franceinter.fr/emissions/le-debat-de-midi/le-debat-de-midi-du-lundi-23-aout-2021
France inter. Exode urbain pourquoi ne quitte-t-on jamais vraiment la ville et ses alentours ?
https://www.franceinter.fr/societe/exode-urbain-pourquoi-ne-quitte-t-on-jamais-vraiment-la-ville-et-ses-alentours
Larsson, B. (1997). Le bon sens commun. Remarques sur la (re) cognition intersubjective dans l’épistémologie et l’ontologie du sens. https://lucris.lub.lu.se/ws/portalfiles/portal/17663944/Le_Bons_Sens_Communs_oa.pdf
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