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Publié le 29 septembre 2022 Mis à jour le 12 octobre 2022

En Gaspésie et aux Îles de la Madeleine, des classes vraiment extérieures

Entrevue avec leurs instigatrices

Le Cégep de la Gaspésie et des Îles a inauguré à l'automne 2022 des installations de classes extérieures pour ses trois campus gaspésiens et des Îles de la Madeleine. La Gaspésie est cette région de l'Est du Québec le long de l'estuaire et du Golfe St-Laurent. Les Îles de la Madeleine sont un archipel situé au milieu du Golfe St-Laurent.

Située au nord du 47ième parallèle, le climat y est assez rude. Pour cette raison nous nous sommes demandé quelle motivation avait bien pu pousser les collèges de la région à vouloir se doter de classes extérieures.

Josiane Bergeron, enseignante en biologie et responsable du comité ACTES au campus des Îles-de-la-Madeleine, Amanda-Émilie Côte-Boudreau, conseillère pédagogique au Cégep de la Gaspésie et des Îles et Danka Cormier, directrice adjointe des études ont très aimablement répondu à nos questions.




1 - Cette expérimentation a bénéficié d’un temps de préparation étendu sur plus d’un an. Quels ont été les principaux moteurs qui vous ont incité à avancer ?

Josiane - J’enseigne en extérieur depuis 15 ans et j’avais la certitude que ce projet diversifierait les méthodes pédagogiques au campus. J’avais envie de faire vivre le slogan du Cégep de la Gaspésie et des Îles avec ce projet « études grandeur nature ». Par ailleurs, j’avais vu que l’Université de Sherbrooke avait mis en place rapidement une dizaine de classes extérieures sur son campus, cela a été pour moi une source d’inspiration et de motivation.

Amanda-Émilie - La volonté de toujours améliorer l’enseignement qui est offert à nos étudiants et de rester à jour dans le développement de nouvelles pédagogies innovantes nous a aussi poussé et encouragé à développer des classes extérieures.

Le fait de diversifier les méthodes d’apprentissages permet d’augmenter le pourcentage de rétention des informations chez notre apprenant. Nos classes extérieures ont le même rôle que nos classes actives: celui de varier les méthodes et d’impliquer nos étudiants dans leurs apprentissages.

2 - Quelles ont été les principales réticences rencontrées ?

Josiane - On peut penser aux coûts d’aménagement, d’entretien et à l’apparition de nouvelles tâches pour le personnel, par exemple. Même si la majorité des enseignants et des enseignantes sont très ouverts à l’enseignement extérieur, certains ont besoin de support pour se tourner vers ce type d’enseignement.

Amanda-Émilie - La pédagogie extérieure est un style d’enseignement bien précis, il faut réapprendre à enseigner. Ce n’est pas une réticence, mais plutôt un apprentissage que les enseignants ont eu à explorer dans leur pratique.

Pour bien expliquer ma pensée, c’est comme si nous délaissions les outils d’interactivités numériques pour retourner au tableau vert avec craies, c’est une adaptation. Mais notre communauté d’enseignant est toujours prête à relever des défis stimulants,  surtout lorsqu’ils connaissent les répercussions positives face à l’apprentissage et à la motivation des étudiants.

3 - À quel point cette préparation est nécessaire pour la réussite de ce genre de projet ?

Josiane - Le temps de préparation est très important pour ce genre de projet. Il faut évaluer les objectifs, les besoins, les fonctions, les sites potentiels pour s’assurer que le projet réponde aux besoins de la communauté collégiale. L’appel à des ressources professionnelles en aménagement nous a été très bénéfique. 

Amanda-Émilie - Demander aux enseignants aussi ce qu’ils imaginent comme classe extérieure; reste que ce seront les utilisateurs qui détermineront les besoins réels. Une classe flexible, une classe au naturel, tableau ou non, tout ceci influence grandement l’enseignement qui y sera donné. Il faut se permette que la classe soit en mouvement, même si nous décidons d’un plan initial, celui-ci peut évoluer, reste que le but premier des classes extérieures est de servir au mieux l’apprentissage de nos étudiants.

4 - Votre région est réputée pour son climat particulièrement frais et venteux et un hiver rigoureux. Comment ces conditions ont elles influencé ce projet et vos attentes ?


Josiane - Dès le début du projet, nous savions que les saisons influenceraient la fréquentation de la classe. Aux Îles-de-la-Madeleine, le printemps est tardif, mais l’automne est doux. Nous pouvons donc utiliser la classe jusqu’à la mi-session durant l’automne sans problème, moins au printemps. En été, l’espace est également disponible pour la communauté. Entre autres, on pense à la tenue d’ateliers de francisation et des activités avec le camp de jour. 

Amanda-Émilie - J’ajouterais que concernant la pédagogie extérieure pure et dure il serait pertinent de dire que la classe extérieure pourrait être utilisée à l'année, il n’y a pas de mauvais climat que des mauvais habits. En effet, notre réalité est un peu différente, encore plus d’un campus à l’autre, n’ayant pas tous les mêmes installations. C’est important que les enseignants se sentent à l’aise d’aller à l’extérieur et c’est surtout important qu’ils réfléchissent à l’activité qu’ils veulent y faire. Si c’est pour faire des calculs, les mitaines sont moins adaptées, mais si c’est pour aller s’inspirer pour une création artistique pourquoi pas.

C’est certain qu’il y a des moments plus achalandés, il faut selon moi les chérir et faire rayonner les activités qui s’y passent pour pouvoir encourager certains enseignants plus téméraires à utiliser la classe extérieure dans des moments que nous pourrions considérer comme moins opportuns.
 
5 - À quoi s’attendent les enseignants et les étudiants d’une classe extérieure ? Est-ce que ceux qui les ont utilisé jusqu’ici s’en montrent satisfaits ?

Josiane - Oui, c’est un succès ! Plusieurs collègues l’utilisent déjà et l’apprécient. La communauté étudiante apprécie également l’espace que ce soit dans le cadre de leurs cours ou même lors des pauses ! Il y a toujours des personnes dans la classe qui viennent étudier, se reposer (dans les hamacs) ou discuter.
 
Amanda-Émilie - Effectivement, les enseignants qui ont osé aller en extérieur ne peuvent plus s’en passer, certains regrettent même déjà la belle saison et attendent la prochaine avec impatience. Cet emplacement, comme vous dit ma collègue, sert de lieu de rassemblement à l’extérieur des cours. Permet une cohésion des groupes. Un sentiment d’appartenance au campus.  Ce sont tous des critères qui augmentent la mobilisation des jeunes dans leurs apprentissages.
 
6 - Quelles recommandations feriez-vous à ceux qui seraient tentés de suivre votre exemple ?

Josiane - Utiliser le guide de l’Université de Sherbrooke: Classes extérieures - Service de soutien à la formation - Université de Sherbrooke (usherbrooke.ca)

Il faut également prendre le temps d’élaborer et de bien réfléchir le projet pour qu’il supporte l’enseignement. Il ne faut pas hésiter à faire appel à des ressources spécialisées et professionnelles. Enfin, il faut bien penser l’aménagement paysager pour favoriser des espèces qui sont bénéfiques pour la biodiversité ou qui sont comestibles. On peut augmenter les bénéfices sociaux et environnementaux d’un tel projet grâce à un aménagement paysager bien réfléchi. 

Amanda-Émilie - La faire à votre image. Et essayer, repousser vos limites et apprécier les opportunités d’aller à l’extérieur. Il n’est pas nécessaire de commencer l’essai avec un cours de 3 heures, mais une activité d’accueil en début de session alors que le beau temps est au rendez-vous vous permettra d’apprivoiser la classe et de ressortir de cette expérience avec un sentiment positif.

7- Sur quels critères évaluerez-vous la réussite de ce projet ?

Josiane - La fréquentation et les retours qu’on a eus de la communauté collégiale sont très bons. On voit que les gens s’approprient l’espace et c’est très positif pour la suite des choses !

Amanda-Émilie - La volonté de la part du campus de Carleton-sur-Mer de créer plus d’espace pour la pédagogie extérieure autour de l’établissement. Il y en a maintenant 3, une avec tableau et mobilier flexible, une avec tables classiques et tableau, et la dernière complètement nature, au milieu d’un boisé avec seulement des bancs.


Références :

Des classes extérieures au Cégep de la Gaspésie et des Îles
https://cegepgim.ca/actualites/des-classes-exterieures-au-cegep-de-la-gaspesie-et-des-iles/

Pédagogie en plein air dans l’enseignement supérieur en contexte de covid-19 au Canada, Guide pédagogique pour appuyer les personnes enseignantes
https://savoirs.usherbrooke.ca/handle/11143/17257

Classes extérieures - Université de Sherbrooke - Service de soutien à la formationhttps://www.usherbrooke.ca/ssf/enseignement/espaces-apprentissage/classes-exterieures

Articles de Thot Cursus sur le sujet : 

La persévérance augmentée par l'apprentissage en extérieur - Alexandre Roberge
https://cursus.edu/fr/21234/la-perseverance-augmentee-par-lapprentissage-en-exterieur

L'école en forêt ou l'éducation par la nature - Sabrina Marie Budel
https://cursus.edu/fr/13269/lecole-en-foret-ou-leducation-par-la-nature

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