
Marketing des commerces de détail et expérience client
Développer une réflexion critique et prospective sur les stratégies et actions marketing mises en œuvre par les détaillants, sous l'angle de la gestion de l'expérience client.
Publié le 11 avril 2011 Mis à jour le 22 septembre 2022
Dans les pays riches, l'argument du "bouleversement de nos modes de vie" est fréquemment mis en avant par les producteurs industriels, les politiques, les économistes... pour dissuader les citoyens d'écouter les alter-tout, ceux qui veulent changer les modes de production, de consommation et de répartition des richesses, dans une perspective de développement durable.
Or, si l'on s'intéresse au commerce électronique, on constate que certes, le e-commerce contrôlé par les marchands professionnels se porte très bien, mais qu'une autre forme de commerce, cette fois établie entre particuliers, se développe à grande vitesse. Sur celle-ci, les économistes ont peu à nous dire, à la fois parce que les chiffres globaux sont bien difficiles à obtenir, et parce qu'elle n'alimente pas le système économique et financier mondial.
Le commerce pair-à-pair prend sur Internet trois formes principales :
La vente entre particuliers de biens d'occasion, telle qu'elle se pratique sur eBay par exemple, sur PriceMinister et bien d'autres sites du même genre. L'idée ici est que ce qui ne vous est plus utile l'est sans doute à quelqu'un d'autre, et que vous allez donc lui vendre le bien en question pour une fraction de son prix.
La location de services associés à des biens. Les sites d'autopartage figurent parmi les plus connus de ces services et se déclinent de plusieurs manières :
La vente entre particuliers (majoritairement) de biens réalisés par des particuliers. Vous êtes photographe ou musicien amateur, tricoteuse, expert des confitures ? Vous pouvez vendre vos créations sur Internet. Les plateformes "places de marché" assurent une part importante de ces échanges commerciaux et les sécurisent, en se payant sur le prix de vente. C'est le cas de tuto.com par exemple, qui facilite la monétisation des tutoriels vidéos réalisés par des particuliers, avec le succès que l'on sait. Aux Etats-Unis vient de naître Skillshare, qui sert de place de marché sur laquelle les formateurs indépendants peuvent vendre les cours (généralement courts, toujours orientés vers des savoir-faire pratiques) qu'ils réalisent dans leur ville. Pour le moment, on ne trouve des cours qu'à New York par le biais de cette plateforme, mais on peut s'attendre à ce que le mouvement s'étende à d'autres villes. Ceci dit, quoi que vous produisiez, rien ne vous empêche d'ouvrir un site pour commercialiser vous-même vos créations, en veillant bien sûr à rester dans la légalité juridique et fiscale de votre pays.
A ces trois formes de commerce au sens propre (échange de biens ou services contre de l'argent), s'ajoute une troisième catégorie d'échanges pairs à pairs, le troc. Cette pratique pluriséculaire a trouvé un regain de vie grâce à Internet, avec des sites qui permettent d'échanger des biens : vous avez vu trois fois le DVD de tel film et vous cherchez tel livre; trouvez la personne qui a exactement le besoin inverse, et le tour est joué !
Rachel Botsman, spécialiste nord-américaine des mouvements sociaux basés sur la collaboration et l'échange, réunit ces quatre manières de se procurer des biens dans la dynamique globale de la Consommation Collaborative (CC). Elle a développé ce concept lors d'une récente conférence réalisée à TEDxSidney. Le développement fulgurant de ces services en ligne tient selon Rachel Botsman a quatre facteurs :
Mais Rachel Botsman estime malgré tout que c'est l'innovation technologique qui a impulsé un mouvement qui sans elle serait sans doute resté à une taille plus modeste. Les jeunes en particulier, développent une vie communautaire en ligne et les Internautes assidus de tous âges partagent naturellement au travers de sites tels que Flickr ou Twitter. Ce qui a développé chez eux des comportements hors-ligne similaires. De plus, la dématérialisation des supports de culture populaire (musique, film) a rendu obsolète la possession de l'objet. Car un fichier n'est pas considéré comme un bien par ceux qui se le procurent dans les réseaux pairs-à-pairs ou les sites d'hébergement de fichiers, au grand dam d'ailleurs des distributeurs qui rêvent toujours de vendre des fichiers comme ils vendaient les galettes des CD et DVD.
Rien de tout ceci ne fonctionnerait sans un élément crucial : la confiance. Et on reste pantois devant la facilité avec laquelle on accorde sa confiance à quelqu'un qu'on n'a jamais vu et qui ne se présente même pas sous son vrai nom sur Internet. Et ça fonctionne ! Rachel Botsman signale que 90 % des échanges réalisés sur un célèbre site de troc nord-américain sont positifs, les 10 % restants étant estimés négatifs pour des détails tels que le temps d'acheminement de l'objet. Même chose chez eBay. Certes, des services tels que PayPal ont considérablement contribué à sécuriser les échanges marchands sur la toile. Mais tous les échanges marchands ou pas réalisés sur la toile n'utilisent pas PayPal, loin de là, et ils fonctionnent quand même.
La confiance serait donc devenue la monnaie de référence du Net. D'où l'importance du scoring, l'évaluation que laissent vendeurs et acheteurs sur les sites dédiés. Rachel Botsman prédit même que d'ici peu, il y aura des moteurs de recherche qui permettront de mesurer le capital de confiance des individus sur la Toile, ce qui déterminera leur niveau d'accès à la consommation collaborative...
Il est donc possible de consommer mieux (et, globalement, moins) sans voir se dégrader son mode de vie. Il suffit de faire confiance à ceux qui, comme vous, souhaitent allonger la durée de vie des produits, partager ce qu'ils possèdent, vous faire bénéficier contre une somme modique de leurs équipements ou de leur expertise.
Certains vont encore plus loin et expérimentent les monnaies alternatives, sujet dont Jean-Michel Cornu est un spécialiste reconnu en France. Si le sujet vous intéresse, voyez cette BD mise en ligne sur le site d'Owni et l'entretien avec Philippe Drudder qui va avec.
Sur Terre et encore plus sur le Net, de nouveaux modes de consommation s'organisent, qui interrogent les notions de propriété, de biens communs et de valeur monétaire. La consommation collaborative a de beaux jours devant elle, et c'est tant mieux.
À lire :
Consommez, qu'ils disaient. Bug.org, Régis Chatellier, 7 janvier 2011
Sur Thot Cursus , retrouvez : André Martin, ou la philosophie de la coopération (entrevue en deux parties)
A voir :
Rachel Botsman: The case for collaborative consumption. TEDxSidney, mai 2010. TED, sous-titré en français
La richesse est ailleurs. BD interactive sur les monnaies alternatives. Owni, 11 février 2011
Illustrations :
Haut : before long, everyone began to tweet / woodleywonderworks / CC BY 2.0 ()
Milieu : capture d'écran de la page d'accueil du site France-Autopartage.
Bas : Friendship / Luis Argerich / CC BY 2.0
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